30 novembre 2008

Crotte de beu

Nous sommes en crise financière mondiale, nous dit-on. Les banques seraient en grande difficulté, les actions atteignent des planchers inégalés, plusieurs industries manufacturières seraient sur le bord de la faillite. Je ne connais absolument rien en économie, mais les experts en la matière semblent s'entendre sur le fait que ça va mal et qu'une grave récession s'annonce, alors je ne peux que les croire, même si moi, en tant qu'individu, peux difficilement faire quelque chose de concret en réaction à la situation.

Alors, si ça va si mal, pourquoi ai-je l'impression que tous les chefs de parti sont en meilleure forme que jamais? Est-ce parce qu'ils ont sous la main un prétexte en or pour justifier n'importe quelle décision, qu'elle ait ou non le moindre rapport avec le contexte économique actuel?

Charest dit avoir déclenché les élections de façon à mieux gérer la crise dans un contexte de gouvernement majoritaire. Il est, semble-t-il, impossible de naviguer un navire en pleine tempête avec « trois mains sur le gouvernail » (des marins expérimentés vous diront pourtant que lors d'une tempête, il faut parfois se mettre à plusieurs sur la barre pour maintenir le cap, mais bon). Comme on pouvait s'y attendre, les partis d'opposition disent exactement le contraire et ajoutent qu'un gouvernement assez irresponsable pour freiner l'exercice parlementaire à un tel moment critique ne mérite pas d'être à la tête de la province.

À Ottawa, Harper a essayé cette semaine de passer une série de mesures idéologiques fort contestables sous forme de vote de confiance, à cause encore une fois de la crise financière. Les partis d'oppsition fédéraux, tout comme ceux du Québec, croient eux aussi exactement le contraire du Premier Ministre et jugent que ces mesures sont inadéquates et vont à l'encontre de toutes les mesures interventionnistes adoptées partout ailleurs dans le monde occidental.

Alors, si je comprends bien, le désastre banquier explique présentement tout et son contraire. Vous ne trouvez pas qu'il y a comme une odeur de bullshit dans l'air? Un peu comme après le 11 septembre 2001, quand tous les transporteurs aériens ont profité de l'occasion pour faire un ménage dans leur personnel. Ou lorsque George W. Bush a déclenché la guerre en Irak, parce que Saddam Hussein aurait des liens très clairs avec Al-Qaïda et en sa possession des armes de destruction massive (les deux accusations se sont non seulement avérées tout à fait fausses, mais en plus sans fondement aucun).

Remarquez, il n'y a rien de nouveau ici. Les politiciens ont toujours menti à la population et ont toujours utilisé des outils démagogiques pour justifier leurs actions intéressées. La différence, c'est que l'électorat est de plus en plus allumé et de moins en moins dupe. Vendredi, à La joute, à Télé-Québec, l'ancien bloquiste Michel Gauthier notait le paradoxe que les sondages d'opinion montrent les électeurs plus cyniques que jamais envers leurs élus, le taux de confiance envers eux allant aussi bas que 8%, comparativement à 75% il y a à peine une quarantaine d'années, quand il est évident que les moeurs politiques se sont énormément assainies depuis.

Même s'ils essaient toujours de nous en passer des belles, l'exercice devient chaque jour de plus en plus difficile et nos dirigeants vont devoir apprendre à ne plus nous prendre pour des imbéciles. Bon, Charest va sûrement rentrer majoritaire quand même le 8 décembre. Harper va probablement trouver d'ici le jour du vote de son énoncé économique une nouvelle manoeuvre pour déjouer l'appareil démocratique, mais le public aura appris quelque chose dans le processus et sera, je l'espère, beaucoup plus difficile à déjouer la prochaine fois.

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