10 novembre 2008

La joie de la démocratie

Ainsi, on s'en va en élections.

Encore.

Il y a bien sûr quelque chose d'un peu étrange dans le fait que la majorité de la population (dont moi) semble irritée par le fait qu'on leur donne une opportunité de se faire entendre et d'exercer leur pouvoir démocratique. Plusieurs habitants oppressés de dictatures du passé comme du présent voudraient probablement nous donner quelques baffes pour oser émettre ce genre de réserve et ce serait fort compréhensible.

D'autant plus que je ne suis pas satisfait du gouvernement présent et que je n'ai aucunement l'intention de voter pour le parti actuellement au pouvoir le 8 décembre prochain. Alors, logiquement, je devrais être heureux d'avoir une chance de pouvoir le renverser et d'améliorer la configuration de l'Assemblée nationale. Sauf que pour ce faire, il faudrait non seulement que le reste des Québécois aient la même vision que moi, mais en plus que les options offertes soient un peu plus intéressantes.

Il y a 5 ans, quelques mois après l'entrée au pouvoir des Libéraux de Charest, le gouvernement était si impopulaire auprès de la population que tout le monde s'entendait que le PQ n'aurait aucune difficulté à reprendre le bâton aux élections suivantes. Quelle fut la stratégie de Charest pour que les gens cessent de critiquer ses décisions et ses actions? Ne plus rien faire. Ou du moins rien d'éclatant. Et ce, en affichant un air assuré, confiant et en contrôle de la situation. Et savez-vous quoi? Ça a marché! Même si la plupart des gens ne sont pas vendus au Parti Libéral, Jean Charest apparaît toujours dans les sondages comme étant aux yeux des gens le Chef le plus apte à diriger le Québec, peu importe ses idéologies, peu importe ce qu'il peut faire concrètement. Sa plus grande qualité étant simplement de ne pas trop gaffer, c'est un peu consternant de voir ça.

Surtout au lendemain des élections présidentielles américaines. Même si je ne crois pas du tout que Obama soit le nouveau messie et qu'il soit capable de faire fondre tous les problèmes en lançant des lasers avec ses yeux (ce qui serait vraiment awesome, soit dit en passant), le fait qu'une majorité d'Américains se soient reconnus en lui et lui aient donné la mission de reconstruire et unifier leur grande nation est vraiment rafraichissant lorsque l'on compare avec le monde politique d'ici.

C'est un peu ça qui est frappant dans le timing de Charest. Il fallait vraiment qu'il décide sous de faux prétextes de déclencher une élection générale dont personne ne veut sauf lui au lendemain du second grand événement historique du XXIe siècle, lui-même une élection, sauf mille fois plus excitante.

Pendant qu'aux États-Unis, on a battu des records de participation, c'est exactement le contraire ici qui se produit. Les gens deviennent de plus en plus cyniques et croient de moins en moins que leur vote puisse changer quelque chose.

Est-ce que cela nous prendrait un Obama à nous aussi pour pouvoir redonner un peu d'intérêt à la politique? Pas nécessairement. Ce n'est pas tant l'homme en tant que tel qui est important dans ce cas précis, mais plutôt ce qu'il incarne. Et Barack Obama incarne l'espoir, la réconciliation et une ouverture à la participation de tous dans l'effort collectif. Un projet de société concret et viable peut avoir un impact similaire.

Ce fut le cas dans le passé ici avec la souveraineté. On a souvent parlé du charisme de René Lévesque et du fait qu'on ne réussissait plus à se doter d'un chef faisant autant l'unanimité. Ce n'est pas tout à fait vrai. C'est d'abord et avant tout, je crois, sa promesse d'offrir un pays à la nation québécoise qui galvanisait autant les foules. Et si en ce moment, cette option est si basse dans les sondages, c'est surtout parce qu'après 2 référendums perdus, les gens ont un peu perdu espoir en cette cause et ont cru qu'il était peut-être temps de passer à autre chose. Et après un taux record presque mondial de participation dans un suffrage universel lors du référendum de 1995 (93,5%), la présence des électeurs au bureau de scrutin ne cesse de décliner depuis. Parce que bien qu'étant prêts à passer à autre chose, ce fameux « autre chose » ne se concrétise tout simplement pas.

Pour donner le goût aux gens de participer à la vie démocratique, encore faut-il leur offrir quelque chose dans lequel ils peuvent croire. Et en ce moment, les politiciens échouent lamentablement en la matière.

3 commentaires:

SCJ a dit...

Une chose est claire est que la politique restera toujours une question de leaders... Le système pourra se démocratiser tant qu'il veut, par des référendums d'initiatives populaires ou autres réformes visant à démocratiser nos structures, il va quand même toujours falloir une personne capable de volonté, de faire, malgré l'adversité. Oui on a quelques politiciens qui font preuve d'une certaine volonté, mais elle n'est que conservatrice, ce qui, par définition, implique une absence de capacités à faire face à la nouveauté ce qui est caractéristique des situations s'accélérants. On est devant le typique "on est fort, faque on fait comme avant", ce qui, ironiquement, nous enlèvera beaucoup de forces dans le futur.

Anonyme a dit...

très bon texte.
Je crois cependant que la fièvre nait des idéess, oui, mais le leader est aussi important sinon plus.

Lisa a dit...

Tout d'abord, excellent texte.
Ensuite, je crois que pour l'instant, nous n'aurons pas de chef du style René Lévesque car il n'y a aucun chef prêt à mettre sa carrière en jeu et autant de gens qui le supporte.

René Lévesque n'était pas un homme qui cherchait le pouvoir pour le pouvoir, et c'est souvent ces gens qui font les meilleurs chefs. Ils mettent de l'avant des idées novatrices qui vont certainement entrainer la critique mais qui vont entrainer des changements de fond sur la société.

Les politiciens parlent de changement, constamment. C'est vrai, a chaque élection, ca change un peu. Évidemment, et je change de linge chaque jour aussi. Mais je ne change pas de métier à chaque année, ni a chaque jour. Un changement quel qu'il soit n'est pas équivalent à un autre.

Enfin. Pour ce qui est de l'attitude de Charest, c'est vrai. Je crois qu'il nous faudrait une rétrospective Infoman des années de mandat de notre bon chef. La mémoire électorale des gens est extrêmement courte.

Il ne faut pas oublier que nous fonctionnons maintenant sous gouvernement minoritaire, ce qui signifie que la population ne fait pas non plus une confiance aveugle à leur dirigeant (et aussi que nous sommes divisés dans nos idéaux).

Enfin, je suis pour un parti qui représente des idées de gauche pour la société, que j'accepte en général, mais je déteste la scission inutile des partis de gauche. Le parti Québécois devrait avoir un plan concret et actuel en cas d'une future séparation, et militer majoritairement pour cela. Ensuite, s'ils sont élus, ils déclenchent le référendum. Enfin, si le référendum passe, le parti se dissout et une course électorale est relancée pour déterminer qui dirigera le pays.

C'est vrai par contre que le PQ ne peut pas déclencher des référendum a chaque mandat. Et aussi qu'il doit savoir gouverner si jamais la réponse des Québécois est "non".

Enfin, excellent texte qui délimite très bien ma pensée sur les élections